Pourquoi le système éducatif finlandais est-il fini

Pourquoi le système éducatif finlandais est-il fini

Par La Rédaction 3 février 2015
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Régulièrement mis en avant, le modèle éducatif finlandais, constitue La Référence en matière d’enseignement pour de nombreux acteurs au  niveau international. Durant de longues années, la réussite des élèves finlandais aux tests PISA et la dynamique positive de l’économie nationale ont « balayé » toute tentative de critique à l’égard de ce système. Pourtant aujourd’hui le tableau ne semble plus être aussi idéal et de plus en plus de voix s’élèvent pour mettre en place une analyse objective de ce que propose la Finlande en matière d’Éducation.

Dans son blog, Donald Clark, observateur des évolutions des solutions éducatives, propose dans un article provoquant, intitulé « Pourquoi le modèle finlandais est-il fini« , une première critique à l’égard du système éducatif et de l’omniprésence des critères PISA dans l’évaluation des compétences des élèves. Edupronet vous en propose une traduction en français.

Pourquoi le modèle finlandais est-il fini

Dans le domaine de l’éducation, des hommes politiques aux enseignants, tout le monde semble être un fan inconditionnel du modèle éducatif finlandais. La Finlande est généralement présentée  comme le paradis de l’éducation, scrutant les premières places du classement PISA, avec une économie puissante, qui est enviée par toute l’Europe. Le problème est que cette image idyllique ne reflète pas totalement la réalité.

Certes la Finlande a occupé la première place du classement PISA en 2000, 2003 et 2006 et a été régulièrement sur le podium durant de nombreuses années, elle a été cependant rétrogradée à la 12ème place en 2013. D’ailleurs, pour obtenir une bonne place au classement de la « ligue des mathématiques », il suffit d’être un petit pays, racialement homogène et qui parle une seule langue. A ce jeu ce sont des nations comme Singapour, Hong Kong, Taipei, la Corée, Macao, Le Lichtenstein qui figurent régulièrement dans le « Top Dix ». Le fait est que la nomenclature PISA, a toujours constitué, pour de nombreuses raisons, un mauvais indicateur de performance d’un système éducatif, et voici pourquoi la réalité finlandaise n’est pas si idéale.

Le piège PISA

Il y a beaucoup à apprendre du modèle éducatif finlandais, mais sans forcément prendre pour argent comptant tout ce que racontent les médias. La critique est récemment venue d’une source improbable, une enseignante finlandaise. Cette dernière a fait voler en éclats quelques idées reçues avec son dernier livre : « Réveiller l’école ! »

Maarit Korhonen, qui a enseigné pendant 30 ans, critique de manière acerbe les résultats du classement PISA. Elle affirme que le système finlandais, avec ses bons résultats, reste démodé et replié sur lui-même. Loin d’être hautement performant, le système éducatif finlandais est devenu l’esclave de la « folie » PISA, s’assurant de répondre parfaitement aux mesures, académiquement limitées, imposées par le classement, tout en laissant un nombre trop élevé d’apprenants en marge du système.

Selon son analyse, 2 enfants sur 3, reçoivent une éducation formatée, trop académique. Ils travaillent de manière intensive sur un programme dépassé, en utilisant des manuels obsolètes. Les enseignants développent un modèle unique d’apprentissage pour tous les enfants. Même les filières de formation professionnelle n’est pas assez soutenue et ne constitue pas une voie alternative équitable.

Un tableau PISA, qui n’est jamais exposé dans les conférences, montre que la Finlande est très mal classée quand il s’agit d’évaluer si les enfants sont heureux à l’école. Pas vraiment conforme à l’image utopique qui est souvent mise en avant d’un système, où les enfants sont « nourris » plutôt que éduqués. Le taux de suicide des jeunes est d’ailleurs élevé par rapport à la moyenne européenne et il n’est pas évident que le système éducatif  offre que des avantages en dehors de l’école.

Tableau PISA bonheur en classe

Economie la moins florissante d’Europe

Qui aurait pu croire que le pays qui s’est aussi souvent classé parmi les premiers aux tests PISA ne profite pas des retombées de ces excellents résultats sur le plan économique ? En effet, en 2015, la Finlande devrait être parmi les plus mauvais élèves européens sur le plan économique. Ainsi, ce mois-ci, les autorités finlandaises ont indiqué qu’ils s’opposeraient fermement à toute annulation de la dette grecque, subissant eux même de grandes difficultés budgétaires, ce qui pourrait avoir de graves répercussions sur l’ensemble de l’Europe. Le système éducatif tant encensé est maintenu au prix fort, avec d’énormes dépenses publiques et une incidence non négligeable sur la dette.

Dans le même temps, une autre cause majeure de l’échec finlandais, a été de s’être trop longtemps reposé sur une grande entreprise, Nokia, qui a contribué pour environ un quart de la croissance économique de la Finlande entre 1998 et 2007. Depuis, la grande multinationale a été dépassée par ses concurrents et a vu son nombre d’employés fondre considérablement. Nokia, qui a connu des parts de marché de 50%, atteint aujourd’hui difficilement les 3%.

Dans le même temps, l’IPhone a « tué » Nokia et l’IPad a « tué » l’industrie du papier, ce qui a mis en difficulté les fleurons de l’industrie finlandaise, dégradant un nombre d’emplois considérables. Angry bird, seul, ne peut pas soutenir tout une économie. Ajouter à cela, la chute du rouble russe, qui a des répercussions sur les échanges commerciaux avec le premier partenaire économique du pays et provoque une baisse de la fréquentation touristique. Avec de faibles revenus et de fortes dépenses publiques, la Finlande devient peu à peu la nouvelle Grèce.

Conclusion

Pasi Sahlberg a récemment donné une conférence intitulée « Et si les professeurs  finlandais enseignaient dans vos écoles? » grâce à quelques exemples pertinentes,  il a démontré qu’une profonde modification du système éducatif doit être entreprise. Et ce n’est pas uniquement un problème de qualification des enseignants, contrairement à ce que l’on entend souvent. Ce n’est pas non plus surprenant que la Finlande soit considérée comme l’exemple à suivre par les éducateurs, étant donné le rôle que le système éducatif accorde à l’enseignant.

Il faudrait pourtant repenser tout cela car les résultats des élèves sont assez médiocres dans d’autres tests de dimension internationale, tel que TIMMS. Cependant, récemment l’administration britannique a affirmé que les  réformes engagée récemment seront encore évaluées par rapport aux résultats obtenus aux tests PISA.  Plutôt que de chercher de bonnes pratiques fondées sur des données probantes en matière d’éducation, les politiciens s’entêtent avec PISA, comme s’il s’agissait d’une référence objective et d’un idéal à atteindre. Ce n’est pas que le système éducatif  finlandais soit mauvais, c’est juste qu’il est temps de de le regarder d’une manière objective et de mettre en place une véritable analyse des indicateurs PISA.

Retrouvez l’intégralité de l’article en anglais

Le Blog de Donald Clark

A Propos de Donald Clark

Donald Clark a été PDG et l’un des fondateurs de Epic Group, qui s’st imposé comme le leader dans le marché de l’apprentissage en ligne au Royaume-Uni. Actuellement membre du conseil d’administration de l’Université pour l’Industrie, City & Guilds (Conseil), Cogbooks, LearningPool , il occupe le poste de vice-président du Festival « Dome & Arts » de Brighton. Donald a 30 ans d’expérience dans l’apprentissage en ligne, les jeux, simulations, les médias sociaux et les projets d’apprentissage mobile. Il a conseillé sur l’apprentissage en ligne de nombreuses organisations mondiales, publiques et privés. Il milite pour l’utilisation de la technologie dans l’apprentissage et a remporté de nombreux prix de design, y compris le premier «Outstanding Achievement Award on E-learning».

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